Le divorce dans les années 40-50
Encore très marqué par la culture chrétienne à l’époque, divorcer est honteux et entraîne dans les milieux conservateurs du nord l’opprobre sociale et surtout familiale. D’ailleurs dans la cour de récréation les écoliers ne jouent pas avec des enfants de divorcés, qui sont montrés du doigt.
Mon grand-père maternel, Rémy Dumoutier, est industriel et catholique pratiquant. Il a fondé avec sa femme, Jeanne Héren, une famille qui va obligatoirement à la messe à Saint-Maurice de Lille à onze heures le dimanche. Ils ont six enfants : cinq filles et un garçon. Dans l’ordre : Annette, Jeanne, Madeleine ma mère, Paulette, Rémy et Michelle.
Chez les Dumoutier, il ne peut être question de divorce pour leurs enfants. A la réflexion je pense que Maman a été désavouée par ses parents, ce qui la conduisit à s’en écarter, pour nous retrouver un jour, elle et moi, isolés de la famille et sans ressources.
1945 : Lille, rue Nicolas Leblanc
Nous ne sommes pas restés longtemps dans cette maison de Mons, car ma mère en fut expulsée un jour par son frère. Il a besoin de récupérer cette villa pour son prochain mariage et j’ai en souvenir les cris et la violence des mots de mon oncle dans la dispute. Je ne suis pas sûr qu’il ait frappé ma mère mais j’ai ressenti cette scène comme une horreur car j’ai vu Maman pleurer dans la cuisine et je ne pouvais rien faire. J’avais honte d’être petit et sans forces pour la défendre.
La suite est un souvenir lugubre. Nous allons habiter dans une petite pièce rue Nicolas Leblanc à Lille, au dernier étage d’un vieil immeuble. L’escalier qui monte est branlant et la chambre est humide et froide. Maman fait des chapeaux qu’elle…