Fut-elle troublée par mon enthousiasme ? Fut-elle gênée par mon regard ou flattée ? Avait-elle songé comme moi à une analogie ? Je l’ignore mais j’eus une très bonne note : 18, je crois. Je ne la revis plus jamais et je l’ai toujours regretté.
La seconde partie
Je croyais être sauf. Comme le bac littéraire offrait peu de débouchés j’eus la possibilité de choisir un bac intermédiaire entre les lettres pures et les mathématiques. Il venait d’être créé et s’appelait Sciences Ex. Allez comprendre pourquoi j’étais si nul en maths et si honorable en physique chimie ? Car mes notes dans ces matières étaient tout à fait correctes puisque j’étais premier de ma classe. L’année se déroula confor- tablement et j’allais tranquillement en juin passer l’écrit de ma deuxième partie. Surprise et déconvenue ! Je fus recalé à nou- veau et convoqué à l’oral de septembre. Entretemps, la veille du bac je passai le concours d’entrée à l’École Supérieure de Commerce de Lille. Et là je fus accepté mais à une condition, obtenir mon bac !
On prend les mêmes et on recommence. Ma grand-mère avait une certaine habitude et connaissait le schéma. Elle trou- vait surtout que j’avais tort de vouloir faire des études. Elle reprenait son antienne qu’elle débitait invariablement quand j’allais passer quelques jours chez elle. J’aurais dû aller à l’École Normale pour être instituteur ! C’est la belle vie disait-elle, « On travaille peu, on a beaucoup de vacances et les gens viennent vous donner qui un lapin, qui un poulet, pour que vous vous occupiez bien de leurs petits garnements ! » C’est un jour, bien plus tard, j’étais diplômé de Sciences Po et officier à Berlin, que je trouvai la répartie qui la laissa interdite : « Mais mémé, je n’aime pas le métier d’instituteur ! » Elle me regarda et me dit:«Pourquoitunemel’aspasditplustôt!»