Rétrospectivement je crois qu’en 1943 je suis déjà orphelin de père. En tous cas je vis (encore maintenant) cette séparation comme une blessure irrémédiable.
Ma mère ne m’avoua jamais qu’ils étaient alors en instance de divorce. Je découvre un jour des documents d’avocat dans des papiers divers accompagnés de témoignages. Je les détruis tous sans vouloir les lire.
Troisième étape, octobre 1943 - été 1944
Les Allemands occupent alors la totalité du territoire français. La ligne de démarcation ne disparaît cependant pas des cartes d’état-major allemandes et certaines restrictions subsistent, notamment en matière de circulation des marchandises. Cette ligne reste ainsi, jusqu’à la fin de la guerre, un moyen de pression actif et aisé à mettre en place, de la part de l’occupant.
Nous vivons à Mons-en-Barœul
Revenant dans le nord début 1943, Maman peut aller vivre avec moi dans la maison de Mons-en-Barœul. Cette maison dite « de campagne » est la résidence d’été et de loisirs que mes grands-parents ont achetée quelques années plus tôt. Ils y vont en fin de semaine et surtout pendant les vacances. Ma grand-mère adore l’eau de Mons et revient rue Colson, à Lille, dans leur appartement cossu, chaque dimanche soir, avec des porte-bouteilles remplis et très lourds.
D’allure normande, cette belle maison avec un toit en tuiles à quatre pentes et un grand escalier, offre une présence solide et protectrice. Elle possède un grand jardin avec un immense tilleul où je me réfugie, et d’où je vois, bien caché derrière les feuilles odorantes, un monde si différent de mes rêves. Des cerisiers généreux et deux parterres de rosiers, qui sont…