Cinéma et peinture
C’est aussi à cette époque, quand j’ai 12 ans, alors que suis passionné par le cinéma, que je comprends que je lui préfère la peinture. Le cinéma me semble être un divertissement éphémère alors qu’un tableau permet la réflexion, parce que le temps n’y est pas compté. Une image qui passe ne donne pas le loisir de comprendre toutes les nuances cachées alors que le tableau, fruit de plusieurs heures de travail au même endroit, comme un palimpseste, laisse se créer une sorte de condensé d’émotions.
Certes Visconti dans le Guépard joue sur les deux registres : cinéma et peinture, dans la scène où Alain Delon entraîne Claudia Cardinale dans les combles du palais du Prince Salinas et laisse un long travelling s’appesantir comme un peintre abstrait sur les murs gris des salles vides. De même Jean Pierre Melville dans le Samouraï, rend hommage à la peinture abstraite quand Alain Delon encore, mais cette fois solitaire, revient blessé dans sa pièce aux murs aveugles et aussi sombres qu’un tableau d’Anselm Kiefer.
C’est justement dans ces cas particuliers que l’on se rend compte de l’importance essentielle au sens littéral du terme, de la peinture !
Mais à vrai dire pour les Renoir, qui ont tout compris et se sont répartis les gloires, on ne sait pas lequel est le plus important. Auguste ou Jean ? Le père, Auguste, est un immense peintre dont les modèles offrent les formes les plus voluptueuses de la beauté féminine dans la peinture, et le fils Jean est le génial réalisateur de La règle du jeu parce qu’il a construit un chef d’œuvre absolu en décrivant toutes les sociétés à travers celle des années trente ! Alors le père suggère et fait rêver alors que le fils décrit et analyse... Bizarrement les deux démarches artistiques sont depuis plus de cent ans complémentaires.