PREFACE - PARTIE 2
… situer mes souvenirs de Bombay, Tokyo, Kuala Lumpur, Papeete ou Berlin. Il en va de même pour le visage de Malcolm X, celui du jeune jamaïcain me menaçant de son couteau sur ma gorge, du vopo tirant depuis le mirador de Bernauer Strasse ou du barman de Birmingham en Alabama sortant son colt en parlant de Kennedy, mais aussi et surtout du légionnaire balafré bardé de décorations dans un garde-à-vous impeccable devant le jeune sous-lieutenant récemment nommé !
Or, si le souvenir est précis quand il arrive sous forme de flash au milieu de la nuit, il ne dure pas. Il faut donc sauter sur l'occasion et se précipiter pour écrire les noms et les événements avant que tout reparte dans les limbes.
La rédaction s’en ressent. Il n’y a pas d’ordre chronologique dans ces souvenirs. Ils viennent à l’improviste décrire un évènement de 1967, de 1989 ou de 2003. Comment être authentique et savoir que c’est la date exacte et le souvenir précis ? je dispose heureusement de plus de 70 albums de photos, un ou deux par année, depuis 1960, sans compter tous ceux de la famille qui les précèdent.
Enfin il y a la trace indélébile des parfums, des lumières, des lieux, des visages, des gestes qui scandent le souvenir comme dans un concerto imposant ses ruptures de rythme et ses silences.
J’ai donc construit cette série de textes par grandes périodes, et les chapitres de cette vie selon ce qui les a caractérisés, et comme je les ai vécus. Au fur et à mesure de l’apparition des souvenirs j’ai rempli les cases qui s’ouvraient, un peu comme avec un puzzle qu’on remplit au fur et à mesure, selon les pièces piochées au hasard.